La femme qui se cachait derrière l’homme de la révolution

18 avril 2015

La femme qui se cachait derrière l’homme de la révolution

En vue des pas de rapprochement entre la Cuba et les Etats- Unis (voir l’Occident), l’attention médiatique internationale redécouvre ce pays dont l’évolution politique est liée à une figure: celle de Fidel Castro. Ce qui n’a pas été donné le même espace pour commentaires était l’annonce de décès d’une cubaine extraordinaire, Natalia Revuelta ou simplement Nat(t)y Revuelta.

Naty Revuelta Clews, décédée à l’âge de 89 ans dans sa villa à Havane, a été considérée la plus belle de sa génération, surtout à l’époque de sa rencontre avec Fidel Castro. Symbole de la bourgeoise cubaine, elle tombe amoureuse du « maximum leader » et offre ses bijoux pour l’aider et ouvrir la voie à la révolution. Elle porte quand même son bébé illégitime.  Rejetée par Castro au moment de son triomphe, elle  reste fidèle à la révolution et voit leur fille  s’enfuir en exil avec des sentiments de mépris vis-à-vis son père.

PAS UNE FEMME FATALE

Naty rencontre Castro se rencontrent dans un événement public à l’Université de La Havane en 1952. A l’époque, elle a 26 ans, et mène une vie confortable, mais peu aventurière, à côté d’un chirurgien (Orlando Fernandez) vingt ans plus âgé d’elle. Sa beauté extraordinaire – des yeux verts, un visage pâle irréprochable-  ne passe pas inaperçue par les Cubains.

La rencontre se fait à la commémoration du massacre d’étudiants cubains par les forces coloniales espagnols en 1871. Un Castro qui, une fois dans la salle magnétise tous les regards, l’approche et lui parle de sa vision pour une Cuba libre. Quant à elle, elle a pris sa décision de rupture avec le régime corrompu de Fulgencio Batista et invite le révolutionnaire Fidel à sa villa, pendant les après midi à l’absence de son époux.

Vite, la villa devient une base de Castro pour organiser son plan d’attaquer  la caserne Moncada à Santiago. Naty  est également militante et y contribue avec ses propres ressources (économies, diamants, saphirs etc).

L’attaque se termine en échec et Castro est imprisoné. Naty ne l’abandonne pas. Au contraire, elle lui écrit sans cesse et lui envoie des livres littéraires. Une fois,  elle remplace la couverture d’une copie du livre de Somerset Maugham par son portrait pour ne pas l’oublier.

« Ecrivez-moi, car je vais craquer sans vos lettres », lui répond dans ses lettres un Castro en perte de moral. Il lui demande quand même d’arrêter de rédiger des lettres à machine pour apprécier son manuscrit, « si délicat, féminin, unique ».

UNE MAUVAISE TOURNURE APRES LA REVOLUTION

Castro est libéré en 1955, et immédiatement, prend divorce de sa première femme. Selon Naty, ils passent quelques mois ensemble d’où il y aura des conséquences après. Le but de renverser Batista toujours dans sa tête, Castro traverse les frontières mexicaines pour mieux s’organiser. Lui ignorant de sa grossesse, Il demande à Naty de le suivre mais elle refuse par peur de sa vie. Leur fille est née en 1956.

Dès lors, elle ne voit pas Castro avant que ses rebelles prennent le contrôle à Havane trois ans plus tard.  Quand il la visite, il rencontre pour la première fois leur enfant, Alina. Dans ses calculs politiques, Naty n’est pas l’idéal compagnon pour lui : son profil bourgeois est incompatible avec l’esprit de la révolution qui est le triomphe des plus démunis.  Toutes attentes différentes pour elle : Elle est rêveuse de devenir la première dame d’un Cuba communiste. Au moment où ce scénario ne va pas se réaliser, elle perd le monde. Castro l’abandonne. Pire, il refuse de reconnaître Alina comme sa fille. (On sait très peu sur les femmes et les bébés de Castro – on lui attribue  au moins sept enfants de trois femmes différentes).

Comme cette mauvaise tournure ne suffisait pas, les visites de Castro  à domicile ont enfin suscité les soupçons du mari de Revuelta, et en 1961, il lui demande divorce pour se déplacer aux États-Unis, avec leur fille aînée, Natalia. En dépit de son rejet par Castro, et la difficulté qu’elle a à vivre dans un pays où il est omniprésent, elle  reste fidèle aux principes de la révolution. Elle s’inscrite dans les brigades de travail, et plus tard va travailler dans des divers ministères. En retour, elle est autorisée à conserver sa villa à Nuevo Vedado, à voyager aux États-Unis pour voir son aînée.

Alina n’apprend pas la vérité qu’à l’âge de 10 ans. Elle avait été donné le nom Fernandez, et quand Castro lui dit qu’elle pourrait utiliser son nom, elle refuse catégoriquement. En 1993, après avoir eu une relation difficile avec sa mère et souffrant de dépression, elle part en Espagne avec un passeport falsifié et portant une perruque. Elle déménage ensuite à Miami, où elle présente une émission de radio critiquant Castro. En 2014, elle rentre finalement à Havane pour la première fois pour visiter sa mère affaiblie.

Naty Revuelta, une fumeur ardente pendant toute sa vie, insistait jusqu’à la fin de sa vie qu’elle ne était pas triste que Castro «  avait mis le projet révolutionnaire devant sa vie personnelle ». Néanmoins, elle avouait, «il m’a fallu de nombreuses années pour le faire sortir de mon cœur « .

 

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